1935-2015, N(icolas) Bourbaki, 80 ans

Le congrès de Besse du 10 au 18 juillet

Cette narration rappelle les principales activités du groupe réuni à Besse-en-Chandesse du 10 au 18 juillet 1935. Il y est question non seulement de mathématiques mais aussi de la qualité de membre, qui sera accordée aux participants à la plénière y compris les retardataires et un absent exceptionnel (Delsarte).

Le 14 juillet 1935,  une partie de la France défilait au son de la Marseillaise, de l’Internationale et de slogans variés dont un « France populaire » bien sonore.  Pendant que nos mathématiciens travaillaient à Besse, le Rassemblement populaire unissait communistes, socialistes et grands syndicats. Mais la « Brève histoire » ne mentionne pas ce prélude à un bouleversement politique en France.

En plus des mathématiques et du « folklore Bourbaki », qui commence ici sa carrière, la « Brève histoire » fait allusion à un autre événement qui venait toucher directement les membres devant « régler des questions financières, rendues deux fois douloureuses par l’arrivée des décrets lois » (DelBe 005, page 3 de l’original). Ces termes évoquent la déflation Laval qui, par 29 décrets-lois, imposait une « réduction générale de 10% de toutes les dépenses publiques. Y compris les salaires des fonctionnaires et les intérêts des emprunts » [J. Javès, Herodote.net, 16 juillet 1935]. Ainsi, les gains de nos mathématiciens boursiers ou salariés allaient-ils diminuer. Malgré tout, en 1935 et après, les membres de Bourbaki financèrent individuellement leurs réunions.

Vraisemblablement, c’est au cours de l’assemblée de Besse que l’équipe a choisi le nom « Bourbaki ». Le récit cocasse d’une baignade n’est pas à prendre au pied de la lettre. Certes, la baignade, à près de 5 kilomètres de Besse, était facilitée par la voiture de Dieudonné (en arrière plan sur deux des trois photos, mais la mise en scène a tout de la composition a posteriori qui donne ainsi un « baptême par immersion » à ceux qui se choisirent un nom. On ignore quand, précisément, si cela a été débattu au préalable. Même avec d’autres occurrences du nom dans les archives de Besse (dans les serments « par la barbe de Bourbaki » et dans les fonctions « bourbachiques » de l’intégration) on peut encore se demander à quel moment et à quel besoin précis la prise de nom correspondait. Les archives de Bourbaki livrent des secrets et en créent d’autres.